« This is how you will disappear »
mise en espace Gisèle Vienne
textes de Dennis Cooper
avec Jonathan Capdevielle, Margret Sara Gudjonsdottir, Jonathan Schatz
musique Stephen O’Malley et Peter Rehberg
Au gymnase Aubanel du 8 au 15 juillet
Premier jour du festival je commence par le spectacle de Gisèle Vienne « This is how you will disappear », une création multiforme, multi-mains, multi-sources… Dans un gymnase immense et glacial, bienvenu par cette chaleur, l’artiste a recréé une forêt sur le plateau. Rapidement des nappes de sons, musique de film d’horreur améliorée nous plonge dans une ambiance lugubre. Une jeune gymnaste s’entraîne avec son coach, répète des mouvements, costumes blancs qui dénotent dans l’ombre. Le texte de Dennis Cooper défile dans un coin en haut, il parle de mort, de tuer, de jeter un corps dans la rivière... Les pulsions de mort de Vienne épousent parfaitement celles de Cooper, leur univers se fait écho. Le coach disparaît, la gymnaste reste seule et danse. Puis une nappe gigantesque de brume nous envahit et plonge le gymnase dans le brouillard.
Nous restons comme cela un moment écoutant la musique brumeuse elle aussi, essayant de distinguer quelque chose sur le plateau. Très belle image et sensation assez forte de dépaysement, et soudain une forme se distingue. Entre les couches de nuages distillées, un homme tête baissé, costume noir et or apparaît. Cela restera pour moi le moment le plus marquant de cet ovni, finalement assez obscur. La rock star sorte d’ersatz de Tokyo Hôtel, abattue, se traîne entre les arbres en gémissant et le coach revient pour lui demander ce qu’il a. Et de nous raconter en pleurant qu’il a tué ou aurait tué sa copine, violée peut-être ? Tout ceci n’est pas clair, fantasme ? réalité ? il pleure… et puis le coach de lui casser la figure, de le tabasser. La fille revient, et penchée sur son cadavre, ou pas, lui parle en chantant sa vie de gymnaste célèbre. Puis tout disparaît et réapparaît un tableau de marionnettes géantes, sorte de scène de camping immobilisé, recréant les personnages précédents et en rajoutant d’autres. Enfin le coach revient, un grillage se baisse, un faucon traverse l’espace. L’ancien coach en tenue de tir, tire à l’arc sur un arbre.
La mise à mal des icones adolescentes que sont la gymnaste ou le chanteur de midinettes, plongés dans une forêt "Blair witchénne", comme la somme de toutes les peurs et la violence de ce passage à l'âge adulte, l'échappée de la nature et des images adultes carcérales... La liberté surveillée et l'impossibilité d'échapper à sa route, "le dérapage"... le fantasme de celui-ci, aller trop loin, mais finalement... mettre la forêt en cage. Transformer les hommes en marionnettes... Nombreuses sont les interprétations de ces tableaux qui se succèdent, mais qui tournent un peu en rond.
D’un côté il faut saluer la facture moderne et singulière, la beauté du décor et l’effort d’univers qui transporte le spectateur. Mais d’un autre je me suis sentie très exclue de ces saynètes enchaînées, qui me racontent trop ou pas assez, d’un texte un peu récurrent et que je trouve plutôt pauvre, et enfin d’une forme posée et sinistre, dont le message si tant est qu’il y en ait un, reste aussi obscur que sa forme. Beaucoup de bruit pour rien a été ma première pensée en en sortant avec énormément de moyens et de gens (musiciens, marionnettes, décor naturel, fauconniers, etc.) pour un fond finalement relativement indigent, qui se veut contemporain et poétique, est en fait pour moi assez plaqué et superficiel.
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