jeudi 28 mars 2013

Memento Mori - Rambert - Godin

Memento Mori de Pascal Rambert, et création lumières Yves Godin, musique Alexandre Meyer
avec Elmer Bäck, Rasmus Slätis, Anders Carlsson, Jakob Öhrman et Lorenzo De Angelis.
Au théâtre de Gennevilliers du 27 mars au 6 avril 2013

Ce n'est pas un spectacle, c'est une expérience. C'est un moment qu'il faut vivre et s'approprier, personne ne verra la même chose. Il faut un peu de calme et de patience (cela nous manque n'est-ce pas dans ces vies...), poser le souffle, se détendre, c'est un moment de spectateur qu'il faut investir de sa personne, physiquement. Nous sommes plongés dans le noir, mais le vrai, et non pas celui qui est vaguement éclairé par une sortie de secours, qui nous perturbe la concentration, ni un noir qui précéderait aux trois coups, un noir théâtral non, c'est un noir foetal. Un retour aux sources, une plongée en soi, et le besoin de s'habituer... Pendant quelques minutes la tentation est de fermer les yeux est là, comme si le noir était insoutenable à regarder. Et voici que l'on s'interroge, sur ses propres réactions, le noir comme un miroir, comme révélateur. 

Et puis soudain il semblerait que l'on aperçoive enfin quelque chose. Mais nous n'en sommes pas sûrs... On finissait par s'y faire, ce cocon, qui ne laissait passer que les sons, d'une salle qui tousse ou chuchote mais aussi parfois se tait. Comme une forme, les yeux essayent de distinguer, et puis une autre et au bout d'un temps, des hommes. 

C'est une expérience rétinienne, les yeux impriment des corps, des gestes, qui se fondent au noir, ou resurgissent ça et là, on est perdu. La nappe de son s'élève, nous sommes aux aguets bien sûr, nous voulons voir, mais quoi ? Ce n'est qu'un jeu de formes, du clair, de l'obscur, du noir sur du clair, de la chair sur de l'ombre... Les balbutiements du langage du corps, les hésitations de la danse, les premiers contacts, que veulent dire ces gestuelles d'âmes qui semblent évoluer sans heurts dans un espace qu'elles habitent ? C'est donc une expérience intime et physique que l'on fait lors de ce spectacle, dont on ne peut publier aucune photo car elles ne restent que dans notre mémoire, sensorielle essentiellement. Un vrai coup de maître du créateur lumière Yves Godin qui peint le spectacle, une création originale d'un metteur en scène qui explore décidément l'humain sous toutes ses formes et un exploit de la part de performers qui évoluent sans beaucoup de repères. 

Un moment rare dont on s'enveloppe et que l'on garde ensuite au fond de soi, comme quelque chose que l'on a aperçu au loin mais dont on n'est pas certain, et qui laisse une trace.

mercredi 20 mars 2013

Avignon 2013 Avant-Programme



19 mars 2013 au théâtre de Gennevilliers, Hortense Archambault et Vincent Baudriller présentaient, accompagnés de leurs deux artistes associés Stanislas Nordey et Dieudonné Niangouna, l'avant programme du festival 2013. Cette 67e édition sera également la dernière qu'ils programmeront puisque Olivier Py sera le prochain directeur. Sans doute un tournant à 180° de programmation est à venir, mais c'est un autre débat ! 

Pour cette 67e édition, le continent Africain sera largement à l'honneur (pas moins de 10 artistes), grâce à l'un des artistes associés, Dieudonné Niangouna, auteur, metteur en scène et comédien venant du Congo. A noter également des habitués et des grands "pontes" du festival, très souvent invités par Hortense Archambault et Vincent Baudriller, qui viendront comme pour faire un dernier tour d'honneur, donner parfois qu'une seule représentation (ex : Castellucci, Cassiers, Cadiot, Delbono, Fabre, Marthaler, Nauzyciel, Ostermeier etc...). Sinon nous retrouverons aussi avec joie Falke Richter, Angélica Liddel, Warlikowski, Philippe Quesne, entre autres, et bien sûr des spectacles de et avec Stanislas Nordey. 

L'Afrique à l'honneur, comme un clin d'oeil à l'Europe en crise, un continent qui ne connaît que ça, la crise, qui se bat et se débat, un continent entier dans la rage du dire, du faire, du vivre... On pré-sent que ces spectacles, pour beaucoup inconnus de nous devraient, sinon nous bousculer, au moins nous interpeller. Peut-être un rappel à l'ordre avant de passer la main sur les missions du théâtre, les messages politique et humains, le corps comme étendard, les besoins d'appel, les tentatives de remuer et de faire bouger les consciences... Avignon sera noire pour ce dernier festival, comme un cri rageur...

A noter la création d'un nouvel espace, la FabricA, lieu de répétition, de résidence à l'année, voulu et conçu par Hortense Archambault et Vincent Baudriller, qui sera une scène de représentation pendant le festival. Inaugurée le 5 juillet, cette salle permettra de faire des représentations avec une vraie hauteur sous plafond, et des répétitions de la taille de la cour d'honneur pour les troupes. 

Le détail du pré-programme ICI


lundi 4 mars 2013

Laetitia Dosch fait péter...

"Laetitia Dosch refait péter Artdanthé" au théâtre de Vanves, le 8 mars 2013, 19h30
Une création de Laetitia Dosch et Anne Steffens, d'après un projet initial de Laetitia Dosch et François Gremaud

Comment dire ? Laetitia Dosch se lance dans un one woman show, elle va nous faire rire c'est sûr, elle nous le promet, elle s'y engage... Elle va faire des tonnes de blagues, et puis des très drôles, des blagues qui grincent, les meilleures... Elle utilise l'humour noir, elle se moque des minorités, elle y va à fond, tout le monde y passe... Les handicapés, les juifs, les étrangers, bref, ici pas de politiquement correct, on n'est pas là pour ça... On est là pourquoi d'ailleurs ? Et puis de quoi parle-t-elle ? Et puis de quoi rions nous ? Pourquoi avons nous perdu cet humour très limite, ou encore n'est-ce pas mieux finalement de ne pas rire de tout...?

Dès les premières minutes le spectateur est sournoisement pris dans des questionnements infinis comme je les aime... Qu'est-ce que la prise de parole en public ? Qu'est-de que l'engagement au théâtre ? Qui assume le "dire" ? Laetitia Dosch n'y va pas par quatre chemins, ni avec le dos de la cuiller, n'y va pas de main morte etc... Toutes les expressions peuvent y passer. Elle joue, avec nous, avec nos idées reçues, et celles pas encore reçues d'ailleurs, elle trifouille, elle rit, elle se rit de nous, elle nous invite à rire, ou pas ? On est embarqué, on ne peut faire autrement et c'est là sa force, dissimulée derrière une hystérie grinçante, irritante, dérangeante...

Laetitia Dosch ne fait donc pas de one woman show, et notre rire n'en est pas vraiment un. Le regard que l'on aura sur elle, sur sa folie, sur ses extrêmes, est comme un miroir qu'elle nous tend. Jusqu'au bout elle saura nous surprendre et nous amener à nous voir autrement, comme spectateurs, comme voyeurs, comme membres d'une société qui est responsable du regard qu'elle porte sur les autres.

A ne pas rater !